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Square des Martyrs du 18 août


Evolution de l'esplanade de la gare (1900-2019)

Communément dénommé « Square des Martyrs du 18 août », l’esplanade de la gare est en réalité composée d’un « Square des Martyrs », et d’un « Square du dix-huit août » (ICAR – Listing des noms de rue en Wallonie). Ces deux squares n’ont cessé de changer de configuration depuis leur création.

Longtemps, l’extrême sud de la Ville-Basse se terminait à la hauteur de la rue de Charleville. Au-delà se situaient des ouvrages militaires, et plus loin encore, des prairies inondables participant à la défense de la forteresse. Démantelée sur ordre de Napoléon en 1803, la citadelle est reconstruite par les hollandais en 1815. En 1829, certains ouvrages défensifs situés au sud sont démolis pour permettre la canalisation de la Sambre (soit son cours actuel). Quelques années plus tard, les fortifications connaissent à nouveau des modifications pour rendre possible l’implantation d’une gare au sud de la ville, à l’intérieur même des murs de la forteresse ; la ligne ferroviaire pénètre dans l’enceinte par des brèches dans les murs.

Dès 1843, les trains marquent un arrêt Ville-Basse. Une modeste halte est aménagée, proche de la Sambre canalisée, un peu plus au nord-ouest que la gare actuelle. Ce nouveau moyen de transport rencontre rapidement le succès : quinze ans après l’arrivée du premier train, environ 120 convois desservent quotidiennement la ville. La gare primitive ne suffisant plus, il est décidé d’ériger une nouvelle station répondant au développement du trafic et à l'accueil des différents services ferroviaires.

Quais de Sambre et esplanade de Charleroi-Central au début du XXième siècle. Carte postale ancienne, Edition Martinetti

Les travaux de construction de la nouvelle gare débutent en 1865 ; Charleroi est alors toujours enfermée dans ses murs, limitant l’étendue de la nouvelle station. Quatre années plus tard, le démantèlement de la forteresse est décidé ; les travaux de démolition des fortifications se terminent en 1871, et ceux de la construction de la nouvelle gare en 1874.

Les voies ferrées situées le long du canal supprimées, un vaste espace est désormais vide entre la station et la Sambre. Deux squares y sont aménagés dans les années qui suivent l’inauguration de la gare ; ils sont présents sur un plan de la ville dressé par Alfred Guilleaume en 1880 ; ils sont également mentionnés dans un article de la Gazette de Charleroi du 21 juin 1888.

En 1883, lorsque le réseau de tramway à vapeur est prolongé de la rue de l’Ecluse à la gare du Sud, le terminus du tram est établi à l’avant de la gare, sur l’espace occupé précédemment par les voies du chemin de fer. Quelques années plus tard, les voies des tramways d’une autre compagnie - la SNCV - arrivent également à la gare, mais les infrastructures des deux sociétés ne communiquent pas entre-elles.

Esplanade de Charleroi-Central dans les années 1930. Carte postale ancienne, Edition Belge

L’aménagement de cette entrée de ville n’est cependant, apparemment, pas à la hauteur de ce que souhaitent les autorités communales. Dès 1888, la ville, en plein grands travaux d’agrandissement et d’embellissement, planifie l’appropriation et l’aménagement de ce terrain, propriété de l’Etat belge. Après de nombreuses tractations, les travaux d’embellissement débutent en 1891. La « place de la Station » est inaugurée en 1892 ; sept « grands foyers électriques » illuminent à cette occasion les squares pendant plusieurs jours, fournis par les usines de Julien Dulait. L’esplanade de la gare est à l’époque plus vaste qu’aujourd’hui, l’espace de circulation sur les quais de Sambre étant réduit. D’autres infrastructures ayant recours au transport ferroviaire viennent s’implanter en bordure de l’esplanade : un bureau de douane et un bureau de poste ouvrent de part et d’autre de la gare.

Depuis, la configuration de l’esplanade ne cesse d’évoluer pour répondre au mieux à son rôle de porte de ville, ainsi que lieu de connexion entre différents modes de transport.

Réaménagement – Années 1950

Esplanade de Charleroi-Central dans les années 1960. Carte postale ancienne, Office du Tourisme de Charleroi

La configuration de l’esplanade semble se maintenir jusqu’au lendemain de la Seconde guerre mondiale. Jusqu’alors, l’esplanade de la gare est constituée de deux squares principaux, bordant l’axe reliant la gare au pont sur la Sambre, chacun flanqué d’un second espace vert. Les photos des années 1930 montrent des squares arborés abondamment fleuris, véritable espaces de promenade à l’entrée de la ville.

Un réaménagement dans les années 50 change radicalement la configuration des lieux. Un « jardin à la française » est implanté face à gare, légèrement en contre-bas de la voirie, bordé de deux pelouses où se situent les terminus des transports en commun. De nouveaux bâtiments sont érigés pour la douane côté ouest de l’esplanade. L’espace de circulation sur les quais de Sambre est élargi, au détriment des squares.

Réaménagement – Années 1970

Dans les années 1970, l’esplanade change à nouveau de configuration. Le premier tronçon du métro entre Sud et Villette est inauguré le 21 juin 1976 ; les tramways rejoignent désormais la gare en utilisant cette nouvelle infrastructure. Le terminus du métro est implanté parallèlement aux voies de chemin de fer, au même emplacement qu’aujourd’hui. Les voies du métro parcourent l’intégralité de l’esplanade permettant le rebroussement des rames vers Villette.

Esplanade de Charleroi-Central - Gare des bus (fin années 1980)

Une gare de bus latérale est aménagée pour la SNCV, au détriment de l’un des squares, ainsi que d’autres quais d’embarquement pour les bus face à la gare ferroviaire, pour la SNCV et la STIC. Les taxis effectuent dorénavant l’appoint dans un tunnel routier sous le square, et un second tunnel reliant le couloir d’accès aux quais de la gare et le quai de la Sambre et percé afin de faciliter le flux piéton. Un pavillon d’information est présent au centre du square.

L’ancienne Poste est démolie à la fin des années 1980 pour faire place à un complexe postal moderne ; le square situé du côté est de l’esplanade disparaît pour permettre la construction de ce nouveau bâtiment.

Avec le temps, cette nouvelle configuration ne correspond plus aux besoins. Les allées en oblique dans le square végétalisé face à la gare ne facilitent pas la circulation des piétons, et les abribus en verre fumé dressent devant la gare une sorte de palissade opaque.

Les années 1990 sont l’occasion d’à nouveau modifier la structure des lieux.

Réaménagement – 1997

Les projets de « bouclage de la boucle » du métro abandonnés, une nouvelle configuration du square, beaucoup plus minérale, est inaugurée le 12 septembre 1997, après plus de vingt ans de vagues de travaux successifs.

Esplanade de Charleroi-Central en 2000

Le projet de reporter la station de métro à l’arrière de la gare définitivement abandonné, à hauteur du quai ferroviaire numéro un et surplombant les voies, une gare terminus du métro surmontée d’un auvent est aménagée côté ouest de l’esplanade, jouxtant l’ancien arrêt de métro. Ce dernier est modernisé et sert au débarquement des passagers ; le nouveau quai est utilisé pour l’embarquement, après avoir rebroussé chemin. Une nouvelle gare d’autobus est créée à l’emplacement des anciens bureaux de la douane. Une aire de verdure est aménagée ; la liaison piétonne gare – pont Roi Baudouin est arborée. Des parkings sont aménagés en surface pour les arrêts de courte durée, et pour les taxis qui ne s’arrêtent désormais plus en sous-sol. La trémie qui leur était réservée est uniquement empruntée par les camions de La Poste pour accéder au tri postal. Une fontaine est placée face à la gare, devant l’entrée de la salle des pas perdus. Deux pavillons d’informations (l’un pour le TEC, l’autre pour la ville) sont aménagés à proximité des sorties de la gare. Un peu plus loin, un tambour commémorant les passages des armées françaises dans la région est inauguré, don de l'association franco-européenne de Waterloo.

Réaménagement – 2011

La Gare de Charleroi-Central et le square des Martyrs en 2019

La fermeture de la boucle du métro (mise en service en 2012) transforme à nouveau le square. Les voies traversent dorénavant le square pour relier les stations Sud et Tirou. Le Monument aux Armées françaises et la fontaine sont déplacés et trouvent un nouvel emplacement sur le square.

Des espaces verts – pelouses et bosquets – sont aménagés de part et d’autre de la place arborée reliant le quai de Sambre à la gare. Les trémies permettant l’accès à l’ancien tunnel aménagé dans les années 70 disparaissent.

Les festivités d’inauguration de la gare et du square rénovés se déroulent le week-end du 25 et 26 juin 2011.

Réaménagement – 2021

Le square est à nouveau amené à être reconfiguré. pour devenir une plateforme multimodale pour les usagers, partagée entre piétons et transports en commun, les voitures étant bannies du site et renvoyées derrière la gare, rue de la Villette. Les travaux débutent après l'été 2021.

Origine de la dénomination : Les martyrs du 18 août

Le 17 août 1944, le bourgmestre rexiste du Grand-Charleroi Oswald Englebin est abattu près du Bois du Rognac à Courcelles ; son épouse et son fils sont également tués. Depuis la disparition de son prédécesseur, Teughels, également assassiné, la répression allemande et rexiste est entrée dans une nouvelle phase : des otages sont régulièrement capturés et exécutés par les allemands en représailles.

Les rexistes vont répondre à l’assassinat d’Englebin d’une manière extrêmement violente, l’un des actes les plus sinistres du catalogue des atrocités rexistes.

La nuit du 17 au 18 août 1944, plus d’une centaine de rexistes venus de Bruxelles et de Charleroi se rassemblent et partent à la recherche de cent dignitaires locaux. Durant des heures, les rexistes vont se déchainer et sillonner la région ; plusieurs personnes sont froidement abattues sur place, des maisons sont pillées et incendiées. Vingt-et-une personne sont arrêtées durant la nuit ; elles sont amenées à Charleroi pour y être dépouillées de leurs effets personnels. Elles sont ensuite emmenées dans une maison réquisitionnée à Courcelles, située dans l’actuelle rue de la Paix, la plus proche du lieu de l’assassinat d’Englebin. Le 18 août au matin, dix-neuf d’entre-elles sont abattues, une par une, dans les caves de l’habitation, et leurs corps jetés à l’endroit de l’assassinat d’Englebin. Au total, les 17 et 18 août 1944 virent périr 27 hommes et femmes, victimes des hommes de Degrelle.

Gare de Charleroi-Central

Esplanade de Charleroi-Central en 2012

Dès 1843, les trains s’arrêtent à la Ville-Basse de Charleroi. La première halte était plus proche de la Sambre canalisée, un peu plus au nord-ouest que la gare actuelle. Une nouvelle gare, plus vaste, est érigée entre 1865 et 1874. Deux grandes halles vitrées sont également construites ; elles persisteront jusque dans les années 1960. L’architecture de la gare présente des allures de palais, faisant penser à certaines gares parisiennes, notamment la Gare de l’Est. Du corps principal de la gare partent deux ailes comprenant commerces et services annexes, débouchant chacune sur un petit pavillon. Rapidement trop exiguë pour accueillir l’ensemble des services nécessaires au bon fonctionnement de l’infrastructure ferroviaire de la région, une annexe est érigée près du Pont de la Résistance en 1938 : l’Hôtel des Chemins de Fer. La Gare de Charleroi-Central est modernisée à plusieurs reprises sans toutefois subir de changements majeurs. Des travaux d’embellissement et de modernisation eurent lieu notamment dans les années 50 et 60. En 2005 débutent les travaux de restauration les plus importants de l'histoire de la station. La façade principale retrouve son cachet du début du XXième siècle avec ses verrières restaurées. La gare rénovée est inaugurée en 2011.

La Poste

Le Bureau de Poste de Charleroi I fut inauguré en 1905 à proximité immédiate de la gare. Il assurait la réception, répartition et expédition des courriers, journaux, imprimés,… Agrandie et modernisée en 1950, les services de tri s’automatisent en 1962. En 1968, certains services sont délocalisés dans la nouvelle tour Albert Ier au cœur de la Ville-Basse.

Esplanade de Charleroi-Central au début du XXième siècle - La Poste. Carte postale ancienne, Editeur inconnu

L’ancienne Poste est démolie à la fin des années 1980 pour faire place à un complexe postal moderne de 25.000m2. Le square situé du côté est de l’esplanade disparaît à cette occasion. Le nouveau bâtiment, mis en service officiellement le 6 novembre 1995, abrite le bureau de Charleroi I, mais également le tri postal, regroupant l’ancien centre de tri de Charleroi, mais également ceux de Mons et de Namur. Raccordé au rail, la quasi-totalité des envois destinés ou en provenance de la France transitent par ce centre avant d’être ventilés dans le reste du pays.

Le 20 septembre 2006, après onze années d’activité seulement, le tri postal carolorégien déménage dans de nouveaux bâtiments situés dans le zoning de Martinrou à Fleurus, à proximité de l'aéroport et de l'autoroute de Wallonie. L’ « ancien » tri, réparti sur deux niveaux, ne répondait déjà plus aux normes technologiques…

Inoccupé pendant 10 ans, puis en partie utilisé comme studio télé, « A6K / E6K », véritable rucher numérique, s’y est installé. Inauguré officiellement le 9 janvier 2020, l’espace se compose de « A6K » (pour Atelier 6000), centre industriel partagé et dédié aux sciences de l’ingénieur, et de « E6K » (pour Ecole 6000), centre de formation multi-opérateurs dédié aux métiers du numérique.

L’entrepôt et les douanes

A l’emplacement de l’actuelle gare des bus se situaient les bureaux des douanes ainsi que des entrepôts. Désaffectés, ils furent démolis dans les années 1990 pour permettre l’aménagement de la gare routière.

Œuvres d’art

Monument du Travail

L’esplanade de la gare aurait pu accueillir un « Monument du Travail », œuvre de l’architecte Janlet et du sculpteur Rombaux. La ville publie en 1911 la description :

« Ce monument (…) est composé d’une série de vasques en gradins dans lesquelles l’eau tombera en cascades ; tout autour de la partie inférieure sont des cracheurs à formes de tortues, phoques, qui relanceront l’eau dans les vasques supérieures. L’ensemble sera surmonté d’un obélisque, dont le socle sera orné de sculptures représentant nos grandes industries : Mines, Métallurgie, Mécanique, Verrerie. Au pied de l’obélisque, figureront d’un côté le coq, symbolisant le Jour, et de l’autre, un hibou, symbolisant la Nuit. Sur les autres faces, d’un côté, les armes de Charleroi ; de l’autre, celles de la province du Hainaut. Au sommet de l’obélisque, se dressera ; comme prêt à s’élancer dans l’espace, le dieu Mercure, statue dorée de trois mètres de hauteur environ. La vasque supérieure sera soutenue par une rangée de colonnes en marbre rouge. L’eau alimentant les vasques sera réemployée par un moteur électrique. Des lampes électriques multicolores, protégées de glaces transparentes, permettront de réaliser des fontaines lumineuses. Le monument sera construit en marbre blanc et pierre de taille. Il aura 20 mètres de largeur à la base et 23 mètres de hauteur. Il sera édifié au centre des squares actuels. (…) ». (IN Une semaine au pays noir : guide officiel illustré, 1911, p. 101).

Ce monument, à ériger grâce à une souscription fournie par les industries de la région, ne sera cependant jamais réalisé.

Regards de Lumière

« Regards de Lumière », aujourd'hui à Gilly

Au début des années 1990, il est question d’installer sur le square de la gare une œuvre réalisée par le carolorégien Charles Delporte. L’artiste imagine en 1989 une version monumentale d’une statue qu’il ne cesse de retravailler, en créant plusieurs versions successives. D’un visage de femme imaginé en 1948, Delporte réalise « Regards de Lumière », une statue de 3,20 mètres de haut, représentant trois visages de femme fixant le firmament dans trois directions. Il était question en 1990 d’aménager un bassin à l’avant de la gare, et d’y placer l’œuvre de Delporte au centre ; c’est finalement sur un rond-point de Gilly, à la croisée de la rocade, de la chaussée de Lodelinsart et de l’avenue Caporal Alain Debatty, que l’œuvre fut placée.



Monument aux Armées françaises

Le Monument aux Armées françaises

Le « Monument aux Armées françaises » fut inauguré lors des Fêtes de Wallonie du 19 septembre 1997, à l’initiative de l'Association franco-européenne de Waterloo. Ce monument rend hommage aux troupes françaises républicaines ou impériales qui passèrent à de multiples reprises par Charleroi et sa région pour gagner le nord, afin de combattre pour la liberté.

Il consiste en un gigantesque tambour en métal de 600 kilos, posé sur un socle de pierre. Il commémore huit batailles qui se déroulèrent entre 1792 et 1940, et durant lesquelles les troupes françaises remontèrent vers le nord et traversèrent la Sambre : Jemappes (1792), Fleurus (1794), Ligny (1815), Waterloo (1815), Louvain (1831), Anvers (1832), Charleroi (1914), Gembloux (1940). L’œuvre est inspirée d’une réalisation du sculpteur américano-japonais Isamu Noguchi installée à New-York. Une dizaine d’années après son inauguration, le monument est déplacé de quelques dizaines de mètres, à l’occasion d’une reconfiguration de l’esplanade de la Gare du Sud.

Statue de Spirou

Le 26 octobre 2018, une statue de Spirou à taille humaine est inaugurée sur l'esplanade. Spirou est installé debout, un bras levé, saluant les passagers de la gare, l'écureuil Spip prenant place sur son épaule.



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